Le car sharing se répand comme une traînée de poudre, un nombre croissant de consommateurs s’enflammant pour ce service, y compris en Belgique. Mais va-t-il bouleverser l’industrie automobile ? Pas nécessairement. Une étude à vaste échelle du cabinet de conseil McKinsey dévoile aussi des opportunités inédites.
La popularité grandissante de la mobilité partagée va effectivement mettre un frein aux ventes de véhicules dans le monde entier, mais elle ne les arrêtera pas. Si le car sharing réduira sans doute le nombre de nouveaux véhicules mis en circulation, la forte croissance attendue dans les pays en développement compensera, voire dépassera son impact dans les 15 prochaines années.
Il ressort en outre d’une étude américaine menée par McKinsey en 2017 que la mobilité partagée ne remplacera que partiellement la possession d’un véhicule : 67 % des répondants américains disent préférer utiliser leur propre véhicule plutôt que des applications de car sharing, et 63 % n’entendent pas échanger leur voiture pour faire du car sharing, même si ce dernier était entièrement gratuit.
Le marché du car sharing dans ses grandes lignes
À l’heure actuelle, la Chine et les États-Unis sont les deux principaux marchés du car sharing. Le marché européen se révèle quant à lui beaucoup plus restreint. Le car sharing y est donc aussi plus fragmenté. Les villes régissent par exemple elles-mêmes ce service. Tout indique cependant que le car sharing va connaître une croissance fulgurante à l’échelle mondiale dans un futur proche. Dans le scénario le plus positif de l’étude, le marché va progresser de 28 % chaque année de 2015 à 2030. Ce scénario repose il est vrai sur une forte demande des consommateurs pour des taxis autonomes, sans chauffeur, dans des villes qui interviennent proactivement pour faciliter l’arrivée de ce type de services. Mais même dans le scénario le moins agressif, avec des clients et des villes qui ne sont pas favorables aux robotaxis, l’étude table sur une croissance annuelle de 15 %, alimentée par la facilité d’utilisation et les avantages économiques.
Obstacles et solutions
Par ailleurs, la croissance dépend aussi de la façon dont le secteur automobile parviendra à éliminer les barrières actuelles. Parmi les principales, citons par exemple le fait que de nombreuses personnes rechignent à partager une voiture parce qu’elles doivent alors faire la navette avec des inconnus, ce qui pour beaucoup se révèle beaucoup plus inconfortable que se déplacer dans son propre véhicule. Un autre gros obstacle est la hausse des coûts liée au car sharing (entretien, lavage, etc.). Or, ces obstacles constituent autant d’opportunités pour les constructeurs automobiles, qui pourraient concevoir des voitures destinées spécifiquement à ce service. Celles-ci seraient plus faciles à nettoyer et dotées d’un équipement moins compliqué, exigeraient un moteur moins puissant et seraient plus simples à produire et à distribuer. Une telle voiture pourrait aisément coûter 25 % de moins qu’un véhicule classique.
Une autre solution réside dans les voitures autonomes. À l’heure actuelle, le car sharing n’est pas rentable dans les villes comptant moins d’un demi-million d’habitants. De leur côté, les véhicules autonomes peuvent revenir dans des sites plus attrayants d’un point de vue commercial une fois le déplacement effectué. Sans compter qu’ils éliminent le poste de frais le plus élevé dans les actuels services de car sharing : le chauffeur.
Les constructeurs automobiles devraient donc pouvoir adapter leur stratégie comme suit :
- Produire des véhicules destinés au car sharing
- Utiliser le car sharing pour satisfaire aux normes d’émissions d’un parc de voitures (davantage de véhicules électriques dans les services de car sharing), pour tester de nouvelles technologies et de nouveaux modèles et pour collecter des données sur les consommateurs
- Se transformer en plate-forme en ligne sur laquelle les consommateurs peuvent organiser le partage
Au fur et à mesure que le car sharing gagnera en popularité, les constructeurs automobiles devront découvrir ce qui le rend si attrayant aux yeux de ses utilisateurs et s’y adapter. Le car sharing freinera probablement la vente de véhicules neufs dans une certaine mesure, mais accouchera aussi de nouvelles opportunités.